AV1, j’en ai très envie mais y’a un truc qui coince
Pour ceux qui ne se rendent pas compte, le monde de la vidéo qu’il soit en ligne ou dans votre salon avec les galettes est un terrain de guerre, une guerre de brevets, trusté par une entité qui bouffe à tous les râteliers. N’étant pas un fan de ce que sont devenus les brevets de nos jours, je ne peux donc que saluer l’arrivée d’un concurrent qui libérerait tout le monde, enfin, quand les tentatives précédentes ont échoué. Mais pourquoi je ne saute pas encore de joie ?
Je ne vais pas refaire toute l’histoire des codecs vidéos et des enjeux financiers actuellement autour de ceux qui sont le plus répandus aujourd’hui, le blog mozfr a très bien traduit l’article qui en fait le tour. Ayant vu le Vorbis, « concurrent du MP3 » ne jamais quitter les distributions Linux, le VP8 et VP9 limités à YouTube (via le format Webm), j’avoue, j’avais un peu de doute quant à la crédibilité d’un concurrent à la fois d’H264 qui règne en maître depuis 10 ans sur la vidéo, et son remplaçant H265 appelé à supporter la 4K et suivants sans tuer nos fibres optiques encore absentes de la majorité des foyers.
Microsoft qui fait payer le codec h265 c'est quand même la blague du siècle,
merci le libre ducoup pic.twitter.com/vRzDuyzRIn— Micode (@Micode) November 22, 2018
Bon, déjà voir une sacré palanquée d’acteurs se regrouper sous une même bannière, l’Alliance for Open Media, a bougé un ou deux curseurs dans mon cerveau. On y trouve à la fois des fabricants de matériels, des acteurs du logiciel, de la communication, des producteurs et des diffuseurs de contenus. L’idée, mettre en commun les ressources financières (développer coute de l’argent), intellectuelles (les ingénieurs c’est pas gratuit), et légales (on a beau dire qu’ils n’y a pas de risques liés aux brevets, on est jamais à l’abri) pour créer un nouvel outil libéré du racket MPEG-LA dont les termes de licences d’utilisation et donc les revenus à leur verser deviennent plus pénibles avec les années, sans parler de l’exclusion de fait via ces termes de licences pour des acteurs non-commerciaux. Et si techniquement c’est supérieur, alors là c’est ceinture+bretelles pour l’assurance d’un pantalon qui ne tombe jamais. Après tout, la vidéo représente maintenant 75% de la bande passante consommée sur l’intégralité du réseau, si on ne veut pas saturer notre bébé il est temps d’agir.
Et tous les acteurs sont d’accord pour que ce nouvel outil soit utilisable par tout le monde sans avoir à filer la moitié de son pognon, un aspect important pour les logiciels libres qui reposent rarement sur des multinationales de la diffusion vidéo pour supporter financièrement ces coûts. En première ligne, les navigateurs Web (bon Chrome n’est pas opensource, je sais, mais voilà…), car malgré la montée en puissance des plateformes mobiles et de leurs applications bourrées d’espions, une grande part de la consommation de contenus vidéo, à la demande ou en direct, passe par eux. Déjà, il avait fallu que Cisco serve de bouclier pour nous proposer dans Firefox une version « open » d’H264 afin de pouvoir lire les contenus dans mon navigateur préféré. Là, l’intégration pourra se faire directement, ce qui est toujours préférable pour les performances.
Justement, les performances. Les chiffres avancés jusqu’ici concernent l’efficacité sur un CPU x86 classique. Hors, malgré les promesses sur nos machines de bureau dont l’âge moyen et la puissance brute à la ramasse ne devraient pas être sous-estimés, le succès ne reposera pas sur un matériel qui n’est plus majoritaire dans la lecture de contenus. En effet, cela fait des années que nos ordinateurs passent non plus par le CPU pour lire les vidéos mais bien les cartes graphiques, qui disposent de circuits dédiés plus efficaces et surtout moins énergivores pour décoder les vidéos toujours plus lourdes. C’est ce qui permet à un Raspberry Pi, qui coûte 30$ et consomme 2W, de lire du Full HD d’une qualité Blu-ray depuis un stockage réseau sans broncher. Hors pour l’instant, malgré la présence d’Nvidia, d’AMD, et d’ARM qui représentent une grosse majorité de fournisseurs de moteurs de décodage vidéo des appareils les plus utilisés du grand public, pour l’instant, je n’ai pas vu d’annonce tonitruante concernant le support d’AV1 dans leurs matériels. Et pour cause, apparemment ça va mettre deux ans, une éternité donc vu la vitesse d’augmentation de consommation du réseau. Ça me rappelle lors de l’arrivée des tous premiers lecteurs Blu-ray, chez Sony comme le matériel dédié au décodage n’était pas prêt, on a intégré des Pentium 4 dans des platines de salon.
Deux ans… deux ans pour que nos box soient capables d’embarquer un matériel qui leur permette d’afficher dans de bonnes conditions les contenus qu’on veut visionner, que ce soit du streaming sur Twitch, de la vidéo à la demande sur Netflix ou sur YouTube, pour prendre des références connues, mais la technologie permettra aussi à d’autres applications peut-être plus spécialisées de voir le jour, avec à la clé bonne qualité, faible conso en bande passante, et également une consommation de stockage réduite, bref, que des avantages. Mais deux ans quoi, sans parler que ceux qui reposent sur les box opérateurs vont attendre tellement longtemps…
Bonjour,
C’est un bon résumé, mais deux ans c’est peut-être également le temps qu’il faudra pour convertir une vidéo au format AV1.
Car la conversion en H265 est déjà largement moins rapide qu’en H264, la conversio en VP9 est encore plus lente et ne peut pas être réalisée avec un GPU pour le moment et mes premiers tests de conversion en AV1 avec ffmpeg n’ont jamais abouti : la vitesse de conversion était de 0.2 FPS sur un Core I7-4790K @4.3Ghz.