Liquidations judiciaires, quand les clients sont les dindons (mais c’est pas une farce)

Cet article a été publié il y a 9 ans 1 mois 10 jours, il est donc possible qu’il ne soit plus à jour. Les informations proposées sont donc peut-être expirées.

Voilà une expérience qui n’a rien à voir avec l’informatique, mais qui mérite le détour. En effet, j’étais client de la société Huis Clos, qui était spécialisée dans la menuiserie (mais pas trop bois), et avant leur fin, dans tout ce qui avait trait à la rénovation dite énergétique (c’est d’ailleurs ce qui nous avais dirigé vers eux).

Comme généralement pour tous travaux réalisés par des artisans s’applique une garantie décennale (traduction pour les moins cultivés : les travaux sont garantis dix ans). Bien, mais que se passe-t-il quand la société met la clé sous la porte avant la fin de la garantie ? C’est le bordel mon capitaine.

Mais si vous la connaissez la société Huis Clos, ils ont même fait de la pub avec Gilbert Montagné. Bref, ma vieille maison avait grandement besoin de rafraîchissement : toutes les fenêtres étaient en simple vitrage, ossature bois, la porte d’entrée et celle du garage aussi. Le tout ayant près de quarante ans.

NB : Pour l’instant, l’État propose encore différents moyens de « financer » tout ça, notamment par le biais du crédit d’impôt rénovation ou le tout récent crédit d’impôt transition énergétique. Les travaux ne seront pas gratuits, mais 30% de réduction reportés sur le budget annuel, avouez que c’est sympa tout de même.

Bref donc, pas mal de boulot au final et le tout réalisé avec la même société. Mais j’ai appris avec stupeur de la part d’un de leurs (ex)agents commerciaux que la société avait été mise en liquidation en Octobre 2013. Je ne détaillerais pas les détails ayant mené à une telle liquidation pour une société qui semblait bien se porter, parce que je n’ai que des on-dit. S’est alors posé la question, si j’ai un problème avec les travaux effectués qui sont encore théoriquement sous garantie, comment ça se passe ?

Puisqu’il n’y a plus de société, j’ai commencé logiquement par prendre contact avec une association de consommateurs, en l’occurrence le bureau local de 60 millions de consommateurs (le site de la DGCCRF recense ces associations par département).

Au bout du fil, j’en apprend une bonne : comme la société n’existe plus, son contrat d’assurance décennale n’a plus cours, donc pas la peine de les contacter. Pire encore : il n’y a pas de « reprise » systématique de la garantie. Chaque dossier de liquidation est différent, et le liquidateur PEUT, mais pas obligatoirement, désigner une ou plusieurs sociétés à même de reprendre le « parc client » de la société démantelée.

J’ai donc, après avoir galéré, tenté de contacter le liquidateur mandaté en Octobre. Le serveur vocal est des plus basiques, et seules quatre « profils » me sont présentés. Dans aucun cas il n’est question d’un particulier cherchant à faire valoir ses droits, si une société ferme, le liquidateur ne traite qu’avec clients professionnels ou créanciers. Classe…

J’ai tout de même trouvé un formulaire de contact sur le site du mandataire. Un courrier « simple », mais le plus détaillé dans ce qu’il m’était possible d’obtenir sans rien avoir à payer (les informations détaillées sur une société sont soumises à rémunération) :

C’était début Novembre. Je voyais les jours, les semaines passer sans réponse (j’avais fourni mon numéro de téléphone fixe, ma boite mail). Ah oui, je ne l’ai pas dit, mais je ne suis pas le seul client de la société dans la rue, ils ont ratissé tout le patelin, donc je savais que les infos allaient servir. Mais pas de réponse.

Jusqu’à fin Janvier, où j’ai été contacté par une société dans le Nord-Pas-De-Calais à propos de la liquidation. C’est une entreprise qui elle aussi fait dans les travaux de rénovation, et à qui mon courrier avait été finalement transmis. En fait, elle a été désignée pour récupérer les clients d’une partie du nord de la France; Huis Clos était national. Seul bémol : pour pouvoir accepter de procéder à d’éventuelles travaux de retouches, il faut d’abord être client chez eux. Et donc commander d’autres travaux avant de pouvoir prétendre à une éventuelle garantie sur des travaux pourtant déjà réalisés. Mieux que rien.

J’ai de la chance malgré tout. Comme j’ai dit, rien n’est obligatoire lors de la liquidation de la société, et j’aurais pu tout simplement m’asseoir sur la garantie et croiser les doigts pour que le climat capricieux qui se dégrade d’année en année ne vienne pas endommager le matériel. Je remarque aussi que le contact avec le mandataire est plus que compliqué pour un particulier, et que l’accès aux informations n’a rien de citoyen. J’ai déjà en horreur les démarches administratives, cette expérience n’est pas prête de me faire changer d’avis sur l’impasse dans laquelle notre pays s’enfonce jour après jour.

En parlant de mandataires, un visionnage très instructif de cet épisode de Data Gueule devrait vous vacciner…